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Moyen Âge

Les invasions barbares apportent de nouveaux éléments ethniques : Wisigoths, Burgondes, Francs, qui fusionnent avec la population primitive. A la fin du VIIe siècle, la Provence est une entité et son peuple, dans la quasi indépendance dont il a joui, a dessiné et affirmé ses caractères fondamentaux.

Mais, de la mer, vient les plus graves menaces. Une première fois, après 736, Charles Martel ayant des visées sur la Provence, le patrice Mauronte qui dirige le pays appelle à son aide les Sarrasins.

Au IXe siècle, l’effondrement de l’empire carolingien crée un climat favorable à de nouvelles invasions. Vers 890 quelques arabes, venus sans doute d’Espagne, s’établissent dans ces hautes collines, à la végétation touffue, qui entourent le golfe de Grimaud, golfe qui est lui-même un excellent mouillage pour les navires. Les textes appellent Fraxinetum cette vaste zone. A partir de cette base sûre, les envahisseurs mènent des expéditions jusqu’en Savoie, dans le Valais et les Grisons. Une première tentative pour les expulser, menée en 942 avec l’aide de la flotte byzantine, est volontairement interrompue par les chrétiens et un accord met fin aux opérations.

En 972 une bande s’empare de l’abbé de Cluny, Maïeul, alors que celui-ci franchit le col alpin. L’émoi est énorme et Guillaume, conte de Provence, en profite pour déclencher une campagne qui va être décisive. Dès l’année suivante, le Fraxinetum est libéré.

Les Sarrasins ont saccagé un immense territoire, de l’Estérel au Brusc, détruit Fréjus et Toulon où il n’y a pas d’évêques durant tout le Xe siècle. Ce pays, presque dépeuplé, n’a plus de maîtres. Est-ce Guillaume qui le partage entre les seigneurs ayant combattu à ses côtés ?
Quoiqu’il en soit, quelques dizaines d’années plus tard, un rameau des vicomtes de Marseille est implanté à Toulon et ses environs, jusqu’à Solliès, la maison de Fos à Hyères, les Grimaldi le long du golfe de Sambracie, les seigneurs de Baux à Rians, les seigneurs de Châteaurenard au nord de Brignoles.

Ainsi, en même temps que la Provence se libère de plus en plus de la Bourgogne transjurane dont elle dépend en droit, se produit à l’intérieur du pays un émiettement de l’autorité. Cette fragmentation ira en s’accentuant, et elle sera, on ne peut plus favorable à la naissance, puis au développement d’un pouvoir municipal que l’esprit d’indépendance des Provençaux vivifiera des siècles durant.

Ainsi le XIe siècle est, dans l’ensemble, une période de reprise économique, grâce à la venue de nouveaux habitants et à l’extension des cultures. Les guerres qui opposent les divers prétendants au titre de conte ne nuisent pas beaucoup, apparemment, à l’est de la Provence, la région de Toulon exceptée peut-être. Mais les Sarrasins reprennent, ou continuent, leur incursions et s’emparent de cette ville à quatre reprises, en 1119, 1146, 1178 et 1197.

Après 973, l’Eglise elle aussi recouvre ses forces. Guillaume aide la reconstitution des patrimoines ecclésiastiques, celui de la cathédrale de Fréjus en particulier.

Aux XIe et XIIe siècles, des abbayes importantes voient le jour : avant 1079, à La Celle, un monastère d’hommes dépendant de Saint-Victor de Marseille et peu après, un autre monastère, de femmes, qui accueille seulement les filles des grandes maisons provençales ; en 1117 une chartreuse à Montrieux près de Méounes ; en 1170 une autre chartreuse à la Verne, non loin de Collobrières ; en 1136 un établissement cistercien, à Tourtour d’abord, puis au Thoronet. En 1260, Le monastère de La Celle Roubaud, près des Arcs où repose sainte Roseline, devient lui aussi une chartreuse.

Sont construites, au XIe siècle la partie romane de la collégiale de Six-Fours ; aux XIIe et XIIIe, la cathédrale de Fréjus et l’église Saint Louis d’Hyères. En 1295, Charles d’Anjou, conte de Provence, décide l’édification d’une basilique à Saint Maximin. Celle-ci réalisée de 1295 à 1532, est, dans le Var, le principal édifice de style gothique.

On commence aussi les châteaux forts, que l’on augmentera ou modifiera par la suite, forteresses imposantes, si l’on en juge par certains vestiges : Evenos, Forcalqueiret, Hyères, Saint-Julien-le-Montagné, Bargème et d’autres encore.

Le 31 janvier 1246, l’héritière du conté, Béatrice épouse Charles, conte d’Anjou, frère de Saint Louis. Charles mène avec rudesse son nouvel état et renforce le pouvoir comtal. En particulier il se saisit des fiefs les plus importants en les échangeant contre des seigneuries rurales. Il s’implante ainsi à Toulon et à Hyères. Et dans ces villes, il met encore la main sur les profits, sûr et notables, des salines, en contraignant les propriétaires à céder à la cour toute la production, et en revendant celle-ci cinq fois le prix d’achat.

Son successeur Charles II, réside volontiers à Brignoles. En 1297, il promulgue une ordonnance relative à l’administration et à la comptabilité de la Provence, ordonnance qui crée une sorte d’autonomie à l’intérieur du royaume de Naples.

Les guerres interminables, menées en Italie, n’affectent pas directement le conté, bien que, sur mer, l’insécurité soit permanente. Dans l’ensemble, la domination de la première maison d’Anjou, jusqu’à la mort du roi Robert en 1343 permet le développement de l’économie et l’augmentation de la population.
Les échanges sont actifs entre la Basse et la Haute Provence. La première fournit à la seconde le sel, l’huile , les poissons, le vin,. De la montagne « descendent » les céréales, les bois, les fourrages, les bovins, les peaux. En cas de besoin on importe des grains du Languedoc ou d’Italie. Saint Maximin, Brignoles, Lorgues, Draguignan, Fréjus constituent autant de centres commerciaux, modestes mais actifs. Une foire se tient au Luc. Toulon et Hyères exportent du sel. En même temps, la population augmente.

Vers le milieu du XIVe siècle la situation se renverse.

Au temps de la reine Jeanne, 1343-1382, des troubles politiques secouent le royaume. Après la mort de cette malheureuse souveraine, qui a adopté pour lui succéder Louis d’Anjou, frère de Charles V, la guerre éclate et dure jusqu’en 1387 entre l’Union d’Aix qui soutient Charles de Duras, dernier mari de Jeanne, et les autres provençaux partisans de Louis. En 1388 ce dernier est reconnu par tous. Mais l’année d’après, un chef de bandes, Raymond de Turenne, commence une guerre privée et ne peut être chassé de Provence qu’en 1399.

Pendant un demi-siècle, la Provence connaît donc des pillages des gens de guerres : Draguignan, Saint-Maximin, Brignoles sont ravagés. S’y ajoutent des épidémies de peste, en 1348 et 1361 notamment, la crainte, fréquente, de la peste, les mauvaises récoltes, de lourdes contributions pour les aventures militaires en Italie. La population ne peut que diminuer. Des terres, parfois fertiles, ne sont jamais cultivées, et des hameaux ou des villages abandonnés (nombre de ces « lieux inhabités » demeureront d’ailleurs jusqu’à la Révolution, des communautés ayant une existence légale).

Plus d’une famille noble sort très éprouvée de ce funeste demi-siècle. Des marchands, des hommes de la terre et surtout les communes profitent largement de la situation.

Les communautés d’habitants ! Elles ont déjà, et elles auront leur existence durant, une très bonne administration démocratique. Assemblées générales, conseils, syndics ou consuls, s’occupent avec exactitude des problèmes essentiels : ravitaillement, état sanitaire, jouissance des biens communs, instruction, affaires religieuses. Par-dessus tout, ils n’ont de cesse qu’ils n’aient racheté aux seigneurs et co-seigneurs les moulins à blé ; les fours à pain, les moulins à huile. Pour eux l’essentiel n’est pas de supprimer des redevances féodales, ni même de créer des ressources dont tous profitent, mais d’acquérir quelque-unes de ces libertés, immédiatement sensibles, dont un Provençal ne peut se passer.

La première moitié du XVe siècle est paisible, mais le pays, trop faible, ne parvient pas à se relever rapidement. Les cultures s’étendent peu à peu, sans reprendre tout le terrain perdu autrefois. Le recul permet d’ailleurs la création d’immense troupeaux d’ovins. Le commerce maritime s’intensifie à partie de 1444.

Ce n’est guère qu’au temps du Roi René (1435-1480) que la Provence connaît un redressement économique véritable grâce à l’échec définitif de l’aventure italienne en 1464, et surtout grâce à l’intérêt que le roi porte, de tous temps, à l’agriculture, à l’élevage, au commerce.

Mais la population a beaucoup diminué et pour faire revivre des lieux inhabités, certains seigneurs font venir des familles de la riviera de Gênes, à Mons en 1460, Saint- Tropez en 1471, Carnoules en 1476, Pontevès et Bagnols en 1477.